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Archive for the ‘Mauvais livres…’ Category

Une « Ode » au Chaos: Chroniques de la dernière révolution d’Antoni Casas Ros

mars 24, 2014 Laisser un commentaire

Dans le monde entier, des jeunes gens se réunissent en secret en haut de bâtiments et se jettent dans le vide, se sacrifiant afin de protester contre un ordre mondial fascisant. Ils suivent le mouvement Flying Freedom initié par la mystérieuse Y, leader mystique et invisible dont le nom, ou plutôt la lettre qui la représente, rappelle graphiquement le sexe féminin. Car selon Casas Ros, « l’ordre est masculin, l’anarchie est féminine » (p.19). Parallèlement aux Freedom Flyers, les Chroniqueurs, d’autres jeunes personnes, sont envoyés de par le monde afin de rendre compte fidèlement des exactions des gouvernements fascistes qui nous dirigent.

 

« AVEZ-VOUS CONSCIENCE QUE TOUT S’EFFONDRE ?[1] » Au début du roman, Ulysse, un jeune homme, rencontre Lupa, une Chroniqueuse, et ils s’embarquent dans une (en)quête pour trouver Y et assister à la dernière révolution évoquée dans le titre du roman, c’est-à-dire la fin de la civilisation capitaliste. Ils voyageront de Nice jusqu’en Amérique, à New York, où se terrent dans les entrailles chtoniennes d’un cinéma abandonné (le Rialto) Aerik Von, un guitariste de heavy metal, Cybèle, déesse négative et invisible, ses panthères et serpents et Waldo, un agent infiltré du FBI (qui devient ironiquement pour l’occasion le Fabulous Bureau of Interconnexion), pour finalement atterrir (littéralement) dans un Mexique fantasmatique et fantasmé sur lequel plane l’ombre du grand Quetzacoatl. Car si au début du roman il est question de terrorisme nihiliste, on passe rapidement à une ode au chaos, une élégie de l’anarchie sociale, personnelle et sexuelle.

Les Chroniques de la dernière révolution sont narrées par une multitude de narrateurs ou de points de vue : on passe ainsi de chapitres racontés du point de vue d’un des protagonistes à des chapitres qui sont des témoignages d’autres Chroniqueurs de la déliquescence du monde, à enfin des extraits de journaux (p.177). L’effet est vertigineux: la multiplicité des voix donne l’impression d’un Chœur quasi-tragique qui submerge le lecteur. Seul problème: le vertige donne souvent le haut-le-coeur…

Antoni Casas Ros est un auteur obsédé par les corps. Depuis son premier roman, Le théorème d’Almodovar, Casas Ros explore le « dérèglement de tous les sens » cher à Rimbaud, et nous en trouvons un nouvel exemple dans les Chroniques. Perdus dans un Mexique transformé grâce à l’effet du peyotl, les personnages se font l’écho d’un appel lancé par l’auteur, qui est en filigrane dans tous ses livres : avoir une sexualité universelle (« Notre problème, c’est que nous n’avons de sexualité qu’avec les humains. Je milite pour la cielophilie, l’arbrophilie, la pierrophilie, la sensoriophilie. Avoir un contact total du corps avec toute chose. Lécher l’univers tout entier, comme un bébé glouton, avant de poser la langue sur un sexe[2]»). Amis lecteurs, voici une preuve que le ridicule en littérature ne tue pas.

En dernier lieu, ces Chroniques de la dernière révolution sont un roman raté. A force de vouloir faire percevoir l’effondrement de la civilisation au lecteur, via la déconstruction du récit, le dérèglement des sens des personnages (le personnage de Waldo est exemplaire dans ce cas) et la reconstruction de nouvelles valeurs, Antoni Casas Ros nous perd par un style animé par un lyrisme exacerbé, une mauvaise imitation du Burroughs du Festin nu,  par des considérations politiques adolescentes[3] (nos gouvernements sont fascistes) quand le récit ne tombe tout bonnement pas dans l’absurde et le ridicule complets (cf. le suicide en masse de chats, ou de bébés qui sautent de fenêtres, ou bien encore le personnage de Violetta, qui guérit les aveugles grâce à son vagin[4]…).

D’une idée originale, Antoni Casas Ros n’a finalement produit qu’un roman assez faible, bien moins intéressant que son recueil de nouvelles Mort au romantisme, ce qui nous fait penser que l’auteur a plus à gagner à se consacrer à la forme courte de la nouvelle plutôt qu’à vouloir imiter les grands romans métaphysiques de Bolaño ou Sabato.


[1] Chroniques de la dernière révolution, p.32

[2] Ibid., p.184

[3] « Dès qu’il y a un ordre, la dictature s’installe. » p.18

[4] Ibid., p.251

La lourdeur du style: « La grâce des brigands » de Véronique Ovaldé

novembre 19, 2013 Laisser un commentaire

Il y a quelques mois, je suis tombé sur une émission de France Inter animée par l’inculte Colombe Schneck à propos de Roberto Bolaño. Véronique Ovaldé était invitée en tant qu’amatrice de l’auteur chilien. Je n’avais à l’époque jamais lu Véronique Ovaldé, et j’imaginais alors qu’elle était simplement influencée par ce grand auteur. La grâce des brigands, le dernier roman en date de Véronique Ovaldé, montre dans quelle mesure l’auteur français n’est pas seulement influencé par Bolaño, mais qu’elle imite son style en réussissant à le vider de tout contenu.

« On peut tout dire, on peut tout raconter, il n’y a pas de limites  » chez Bolaño, s’extasiait Ovaldé lors de l’émission de France Inter. C’est ici, pour moi, qu’Ovaldé se trompe. Bolaño a en effet une palette de sujets incroyables, et ses romans sont (dé)construits avec nombre digressions (car il est sous bien des aspects un représentant du postmodernisme), mais chaque digression apporte un éclairage, a une signification interne au texte. Si je devais inventer un terme de critique littéraire, je puiserais dans la linguistique et je dirais que ses digressions sont des pointages endophoriques. Ovaldé reprend la technique à son compte, mais perd le sens. Elle imite les longs catalogues de pensées des personnages de Bolaño, mais là où chez l’auteur chilien on touche au vertige, on verse chez l’auteur français dans l’ennui.

La mère de Maria Cristina aurait pu dire, si elle l’avait rencontré, ce qui est une chose absolument impossible, quel que soit l’espace-temps où l’on se place, mais en imaginant qu’elle se soit retrouvée face à un homme de ce calibre par on ne sait quelle fortuité, elle aurait sans doute dit, Tu parles d’une armoire à glace.

La grâce des brigands, p.23

« Tu parles d’une armoire à glace »? Tout ça, pour ça? Comparons avec un extrait de Bolaño, choisis au hasard mais représentatif du vertige mentionné au-dessus. Il s’agit du passage précédant le meurtre des sœurs Garmendia par Alberto Ruiz-Tagle, le « nouvel artiste chilien » d’Étoile distante:

Évidemment, lui ne lit rien, il s’en excuse, il dit qu’après de tels poèmes les siens sont de trop, la tante insiste, s’il vous plaît, Alberto, lisez-nous quelque chose de vous, mais il demeure inébranlable, il dit qu’il est sur le point de conclure quelque chose de nouveau, et qu’il préfère ne rien en dévoiler jusqu’à ce qu’il ait fini et corrigé le tout, il sourit, hausse les épaules, dit: non, non, non, et les sœurs Garmienda le soutiennent, tante, ne l’ennuie pas, elles croient comprendre, pauvres naïves, elles ne comprennent rien (« la nouvelle poésie chilienne » est sur le point de naître), mais elles croient comprendre et lisent leurs poèmes, leurs magnifiques poèmes, devant Ruiz-Tagle qui a l’air enchanté (et qui, certainement, ferme les yeux pour mieux écouter), subissant, de temps à autre, les commentaires insipides de leur tante, Angélica, mon enfant, comment peux-tu écrire de telles choses, ou Veronica, mon enfant, je n’ai rien compris, Alberto, voudriez-vous m’expliquer ce que signifie cette métaphore? et Ruiz-Tagle, empressé, parlant de signe et de signifiant, de Joyce Mansour, Sylvia Plaht, Aljandra Pizarnik (bien que les sœurs Garmendia disent non, nous n’aimons pas Pizarnik, et voulant dire, en fait, qu’elles n’écrivent pas comme Pizarnik), et Ruiz-Tagle parle déjà, et la tante écoute et acquiesce, de Violeta et Nicanor Parra (j’ai connu Violeta, sous son chapiteau, oui, dit la pauvre Emma Oyarzun), et puis il parle de Enrique Lihn et de la poésie civile et si les sœurs Garmendia avaient été plus attentives elles auraient remarqué une lueur ironique dans les yeux de Ruiz-Tagle, poésie civile, je vais vous en donner, moi, de la poésie civile, et enfin, définitivement lancé, il parle de Jorge Caceres, le surréaliste chilien mort en 1949 à vingt-six ans.

Étoile distante, ed. Bourgois Titres, pp.33, 34

De manière générale, Bolaño a une palette et un champ d’exploration plus grands, plus larges, plus profonds que ceux d’Ovaldé. Là où la conclusion d’Ovaldé est pauvre, Bolaño ouvre les champs du possible sémantique et littéraire.

Que dire également du bien infécond recyclage du personnage d’Archimboldi de 2666 dans le personnage de Peeleete? Tout y est, l’enfant étrange, l’obsession (avec le monde aquatique chez Archimboldi, les nombres chez Peeleete (?)), le thème du sauveur qui doit venir (le « géant » de 2666, et la « vilaine tante » (sic) d’Ovaldé, cf. p.283). Le tout est légèrement gênant dans l’évident manque d’inspiration de l’auteur français.

La grâce des brigands est un livre qui se lit vite, très vite, mais on est souvent gêné par les images trop facilement fantaisistes de l’auteur, comme si Véronique Ovaldé s’injectait du Prévert en intraveineuse avant d’écrire (ceci n’est pas un compliment), ou par des listes, faut-il l’avouer, assez inutiles. Le personnage de la mère folle aurait mérité une caractérisation moins caricaturale, et de manière globale il faudrait qu’Ovaldé lâche la narration indirecte et mette en scène ses personnages.

Après tout, elle veut écrire des romans.

gracebrig

Véronique Ovaldé, La grâce des brigands, Editions de l’Olivier, 19 euros 50

Intertextualité, plagiat et cheeseburger: D’un faux problème littéraire

août 26, 2011 3 commentaires

Je n’ai pas lu Ticket d’entrée de Joseph Macé-Scaron. Je préfère le dire tout de go, car l’auteur de ce livre – qui aujourd’hui a créé une véritable tempête dans le petit verre d’eau du monde littéraire français – est soupçonné de plagiat. Macé-Scaron a recopié des passages entiers de divers livres (celui de Bill Bryson et Jay McInerney, The Good Life) et les a incorporés dans son roman. Les sites Acrimed et Arrêt Sur Images ont « tiré la sonnette d’alarme », selon le jargon journalistique, et se sont livrés à un « décryptage » du plagiat en question…

Il est vrai que les passages cités sont accablants et que la défense de Macé-Scaron n’est pas très convaincante, même s’il a raison; en effet, le directeur du Magazine Littéraire est tout à fait dans son droit lorsqu’il évoque l’intertextualité (« La littérature ne s’écrit pas ex-nihilo, les auteurs se nourrissent les uns des autres et l’ont toujours fait. »(1)), le seul problème étant la valeur littéraire de ces « emprunts ». Des clins d’œil d’un auteur à un autre, des références tacites, des jeux littéraires, bien évidemment que la littérature en est remplie. Heureusement pour le lecteur attentif et cultivé qui multiplie ainsi son plaisir de lecture! Mais qu’en est-il des extraits recopiés par Macé-Scaron?

Exemple, tiré de l’article d’Acrimed:

Macé-Scaron, p. 222 :

Il aimait quand le serveur dans un restaurant l’informait qu’il s’appelait Bill et serait à sa disposition pour le servir toute la journée. Dans ce cas, je devais me retenir pour ne pas lancer : « C’est d’un cheeseburger que j’ai besoin, Bill, pas d’une liaison ».

Bryson, p. 187 :

Notamment quand le serveur m’informe que son nom est Bob et qu’il sera à ma disposition pour me servir toute la soirée, je dois me retenir pour ne pas lui lancer : « C’est un cheeseburger que je veux, Bob, pas une liaison ».

Etait-il nécessaire de recopier ce passage, Monsieur Macé-Scaron? Est-ce un ‘clin d’œil’ à Bill Bryson, auteur pas bien connu en France et donc très facilement ‘recopiable’, ou tout simplement quelques lignes de remplissage facilement trouvées? Quel est l’intérêt de faire un « clin d’œil » caché à un auteur que peu de gens connaissent? Sauf si l’on souhaite recopier des passages sans citer l’auteur réel – et là nous sommes en face d’un véritable plagiat.

Qu’en est-il du passage de McInerney? Le Nouvel Obs nous donne le passage incriminé:

 «Ticket d’entrée», Macé-Scaron:

«Moi, ce que je voudrais, c’est me retrouver sur la plage du Lido. Sur la plage comme quand j’avais six ans et que personne n’était mort, et je voudrais que ce printemps italien ne s’arrête jamais. J’avais l’impression que c’était comme ça, que ça durerait pour toujours et que jamais rien de mal n’arriverait.»

«la Belle vie», McInerney:

«Moi, ce que je voudrais, c’est me retrouver sur la plage. Sur la plage comme quand j’avais six ans et que personne n’était mort, et je voudrais que l’été ne s’arrête jamais. J’avais l’impression que c’était comme ça, que ça durerait pour toujours et que jamais rien de mal n’arriverait.»

Il est plus difficile de recopier du McInerney, surtout un extrait d’un des ses livres les plus connus, sans qu’on s’en rende compte. Alors, clin d’œil littéraire? Possible, mais bien maladroit. On pourrait même croire que Macé-Scaron a trouvé la phrase de McInerney tellement belle qu’il a voulu… se l’approprier.

Et pourquoi pas? Comme je dis souvent, les bons artistes empruntent, les grands artistes volent. Et généralement, le grand artiste prend ce qui l’intéresse et le transforme tellement que cela en devient une création nouvelle. Si les plagiats de Macé-Scaron ont été trouvés, ce n’est pas qu’ils sont mauvais en soi, c’est qu’il n’a pas su mieux les cacher et les transcender.

Le problème est que Monsieur Macé-Scaron est un bon artiste, mais pas un grand artiste.

1- Source AFP.

Dernière minute! Houellebecq n’aurait pas plagié Wikipédia.

novembre 26, 2010 Laisser un commentaire

(Copyright Benoit Tessiers/ Reuters)

 

C’est une information qui vient de tomber: Michel Houellebecq, soupçonné d’avoir plagié des articles entiers de l’encyclopédie participative en ligne Wikipédia dans son dernier roman La Carte et le territoire (Prix Goncourt 2010), est enfin lavé de tout soupçon. En effet, la conclusion d’analyse génétique menée par un collège d’universitaires spécialisés en stylistique met en lumière que ce ne serait pas M. Houellebecq qui aurait plagié Wikipédia, mais bien Wikipédia qui aurait plagié Houellebecq. Le style sans relief, froid, encyclopédique, soporifique de l’auteur se retrouve dans beaucoup d’articles du site bien connu des internautes pour ses informations sûres et toujours vérifiées. Comme M. Houellebecq écrit depuis plus longtemps que n’existe Wikipédia, il est logique que le plagiat se trouve du côté de l’encyclopédie en ligne. A cette heure, encore aucune réaction au siège américain de Wikipédia, mais l’avocat de M. Houellebecq a fait savoir par voie de presse que l’auteur souhaitait porter plainte pour « plagiat et dégradation de la personne morale de l’auteur ». A suivre…

Source: Picsou Magazine

Houellebecq, insipide et inutile.

octobre 6, 2010 2 commentaires

Généralement, je sais si je vais lire (et aimer) un livre dès la première page. Non, en fait, dès la première ligne. Oui, je fais partie de ces gens qui jugent un livre, non pas à sa couverture, mais à sa première ligne. Et ça marche quasiment tout le temps. Je ne l’explique pas vraiment, mais c’est comme ça que je fonctionne.

Prenons un exemple pratique: j’ai ouvert, il y a quelques jours, le dernier Houellebecq, La carte et le territoire.  Les premières lignes ont été dissuasives: j’ai reposé le volume sur son étagère et je suis allé me rincer les yeux avec de vrais auteurs.

Je pensais en avoir terminé avec ce livre, mais c’était sans compter le bruit médiatique qui l’accompagne. Articles de presse, débats, fausses polémiques (« Houellebecq a-t-il plagié Wikipédia? » – cette question en dit long sur l’état du débat littéraire en France aujourd’hui), et surtout, le dithyrambe quasi-unanime de tous les journalistes littéraires (à part Eric Naulleau – mais on sait qu’il ne cherche à plaire à personne…). Seul Tahar Ben Jelloun a le courage de dire ce qu’il pense du livre, mais comme le dit Jérome Garcin, du Masque et la Plume, il n’est pas critique¹. Point.

Bref. Avec tout ce tintamarre, je me suis dit qu’il fallait peut-être donner une nouvelle chance à ce livre, allant ainsi contre mon éthique littéraire personnelle. Ce n’est pas que je crois Arnaud Viviant, lui aussi critique au Masque, lorsqu’il dit que non seulement Houellebecq est le plus grand auteur français mais que le monde entier nous l’envie: même Viviant, lors de son intervention lors de l’émission de France Inter, n’y croyait pas lui-même. Non. Mais il est possible que Houellebecq ait écrit un bon livre. Après tout, il est fan de science-fiction, alors tout peut arriver.

J’ai donc décidé de faire le test de la page 99. Qu’est-ce que c’est? C’est l’idée qu’a eue l’écrivain anglais Ford Madox Ford, qu’il exprime en ces termes: « Open the book to page ninety-nine and read, and the quality of the whole will be revealed to you. »

« Ouvrez le livre à la page 99 et lisez: la qualité du livre entier vous sera révélée »: le concept est radical, mais bien vu. Comme le souligne Céline de Fluctuat.net, « pour un grand nombre d’ouvrages, [la page 99] se situe à peu près au tiers ou au quart du roman. A cet endroit-là du livre, les personnages sont censés être posés. Le rythme (à supposer qu’il y en ait un) aussi. On est assez avancé dans le livre pour obtenir quelques indices concernant l’intrigue. »

Michel Houellebecq et son fidèle toutou

J’ai donc ouvert La carte et le territoire à la page 99, et je l’ai lue. « Et alors? et alors? » s’impatientent les lecteurs de cet article. Hé bien, chers amis, j’ai fait la même chose que la première fois: j’ai reposé le bouquin sur son étagère et je suis allé lire un peu de Joseph Conrad, histoire de désinfecter. La page 99 du roman de Houellebecq est insipide (la place dans la société d’aujourd’hui des prêtres – Oh my God), comme j’imagine le reste du roman, mal écrite (il y a un problème de construction de phrases – et ce n’est pas du style), et surtout, inutile. Dans cette page, Houellebecq veut critiquer notre époque en prenant l’exemple d’un métier qui n’y est pas adapté, mais sa description n’est ni pertinente ni amusante. On nage dans la réaction tiède. Enfin, je ne sais pas, mais quitte à être réactionnaire, comme Houellebecq entend l’être, autant tout faire sauter, non? Non. Houellebecq, c’est le terroriste qui balance des grenades, mais les fruits, hein. Pas les bombes. Et les fruits sont trop murs.

Insipide, mal écrit, inutile: comme disait Pascal à propos de Descartes: « Descartes, incertain et inutile », je crois qu’on peut en toute bonne foi dire la même chose de Houellebecq aujourd’hui: « Houellebecq, insipide et inutile ». Et n’achetez pas ce bouquin, s’il vous plaît.

PS. Le concept de la page 99 vous plaît? Allez donc faire un tour sur ce site, qui met en application l’idée de Ford Madox Ford: http://page99test.blogspot.com/ , et bien sûr, tentez vous -mêmes de faire le test…

1. Le Masque et la Plume, France Inter, émission du 12/09/2010

Une parodie de Houellebecq

juillet 1, 2010 2 commentaires

Michel Houellebecq (©Mariusz Kubik)

Le (très bon) site d’information culturelle Fluctuat.net a lancé, il y a deux semaines, un concours de pastiches d’incipits de Houellebecq, en prémisse à la sortie de son nouveau roman, La carte et le territoire. D’après ce que l’on sait pour l’instant, Houellebecq mettra en scène dans son nouveau livre une foule de personnages, dont un artiste contemporain exposant des cartes Michelin, et l’auteur Houellebecq lui-même. Comme j’ai eu l’heureux plaisir de voir qu’un texte parodique que je leur ai envoyé a été publié sur leur site, j’ai décidé de reproduire ici mon incipit de La carte et le territoire.

« Dégage de là gros dégueulasse. »

Jamais je n’aurais cru que de tels mots pussent sortir d’une si jolie bouche, même si cette bouche, aux lèvres fines et roses, aurait pu figurer dans le Larousse en tant qu’illustration de l’expression bouche à pipe. La jeune femme à qui appartenait cette jolie bouche, une rousse un peu pétasse, se détourna de moi en faisant une moue dégoutée et alla poser son cul moulé dans cette robe noire à paillette qui attirait tous les regards des mâles dominants et dominés de la soirée parigote ultra-hype à laquelle j’avais été invité par erreur. Elle alla s’asseoir à côté de l’écrivain dont elle était l’attachée de presse, un vieux grisâtre fumotant une cigarette molle, qui, selon Simon, été passé près du Prix Goncroûte pour son précédent livre, et qui revenait avec sa nouvelle ‘Œuvre’ intitulée La carte et le territoire. Il se nommait Houellebock, je crois bien. Enfin, je suis pas sûr. Après tout, je n’étais ici que par erreur.

Normalement, je n’aurais jamais dû être ici, dans cet appartement grand luxe près des Grands Boulevards. Je n’aurais jamais dû avoir été capable d’entrer dans ce lieu de débauche dorée, cela aurait dû rester terra incognita pour moi. Je crois que la griserie apportée par le fait que moi, Michel Welkeb, ingénieur agronome, respire le même air que ces gens beaux, sûrs d’eux, sexuellement épanouis, m’a fait perdre la tête. Le champagne à volonté n’y était pas pour rien non plus. Tout ça pour dire que j’ai essayé de coincer la rousse (« salut, ça te dit un tour de manège ? »), et qu’encore une fois, je vais finir à me polir le chinois sur un site porno allemand où de grands blonds avec des queues de trente centimètres enviandent des asiatiques gémissantes. Vive la mondialisation.

L’erreur Milena Agus

août 18, 2009 Laisser un commentaire

Je ne sais pas ce qui m’est arrivé. Je devais prendre le train, à la Gare de Lyon, et je suis entré dans un de ces bureaux de tabac/ librairies aux devantures rouges. Je me suis mis à farfouiller dans les bouquins, histoire de voir si je ne pouvais pas trouver un livre pour la route. Après avoir mis sous le bras le dernier Inrockuptibles en date (je ne lis quasiment jamais les inrocks, mais là, ils avaient une couverture qui était pour le moins persuasive), je suis tombé par hasard sur la version poche de Mal de pierre de Milena Agus. J’avais lu ici et là quelques (bonnes) critiques de ce livre, et je l’ai acheté. Pauvre de moi! L’écriture de ce ‘truc’ est pauvre et inintéressante, le tout parsemé de grandes phrases philosophiques (‘La nostalgie, c’est de la tristesse, mais aussi du bonheur’ (sic)). Bref, à éviter!

Milena Agus, Mal de pierre, Le livre de poche, 5 euros.Milena Agus, Mal de pierre, Le livre de poche, 5 euros.

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Bégaudeau: vers la médiocrité

avril 14, 2009 1 commentaire

Il s’y dirige, tout en douceur. Bégaudeau, le crâneur des fausses lettres françaises, a récidivé: un nouvel opus sort aux éditions Verticales. Vers la douceur: le titre n’est pas trop mal choisi, mais c’est à condition d’en rester là. Car dès que vous parcourez quelques pages, ou même lisez la quatrième de couverture, une drôle de sensation s’empare de vous, vous vous mettez à bâiller, la tête vous tourne, vous riez nerveusement: oui, vous tenez entre vos mains un mauvais livre.  Le mauvais livre a ceci de particulier qu’il ne trompe personne. D’ailleurs la cohorte des journalistes littéraires s’en est donné à coeur joie, de dégommer le petit Bégau… et à raison. Le style est inexistant – ou raté, c’est selon. Les exemples que donne Nelly Kaprièlian des Inrocks sont bien trop cruels pour que je les cite à nouveau. Non? Bon d’accord.

“Elle, elle en avait plus que pour le petit, le truc fusionnel tu vois, et lui ça le dégoûtait cette chatte qu’avait été écartelée, quelle connerie aussi d’assister à l’accouchement, pour le prochain on m’y reprendra pas j’te promets. Et puis c’est revenu, c’était revenu, c’était revenu dix fois plus qu’avant, maintenant elle en redemandait tout le temps, il pouvait à peine fournir, si ça se trouve un jour elle irait voir ailleurs pour se refroidir le cul (…).”

“Sortir avec un dépressif quelle marmelade d’oranges en effet.”

“La porte a de nouveau affiché les lettres de Delpech, comme Michel, sauf que le brun frêle et chétif ne s’appelait pas Michel, ou alors ce serait la fausse bonne idée de parents fantaisistes, quoique sa quarantaine passée situait la naissance du résident avant l’avènement du chanteur de charme (…).”

Les extraits sont cruels, mais surtout cruellement représentatifs de l’écriture bidon (pas d’autre mot, désolé) de l’ex-plus-mauvais-professeur-de-français-de-France. A éviter, donc. A éviter aussi: Entre les murs, chef-d’oeuvre politiquement correct et vraiment démago (estampillé IUFM pur jus).

François Bégaudeau, Vers la douceur, Verticales, 16,90 euros.François Bégaudeau, Vers la douceur, Verticales, 16,90 euros.